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Force des muscles de la hanche et blessure au niveau du ligament croisé antérieur

par P. Debraux | 3 Mai 2016

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Les blessures du genou sont parmi les plus handicapantes pour un sportif. Le ligament croisé antérieur (LCA) est le plus touché, avec un taux de blessures annuel de 3.67%. Très présentes dans les sports collectifs, ces blessures peuvent être provoquées lors des contacts entre adversaires ou coéquipiers, mais elles peuvent survenir également sans le moindre contact (environ 70% des blessures liées au LCA), lors des accélérations et/ou des décélérations, des changements de direction, des sauts, des réceptions de saut, des prises d'appui, etc. De plus, les athlètes féminines semblent être plus touchées que leurs homologues masculins. Ces blessures survenant sans contact direct sont généralement associées aux patterns de mouvements de l'athlète. Théoriquement, ils seraient donc possible de les prévenir, ou tout du moins, de les diminuer.

En effet, quelques études ont montré qu'un valgus des genoux, des déplacements latéraux et en flexion/extension du tronc ou des mouvements de rotation interne de la hanche pouvaient prédire le risque de blessure au niveau du LCA. Ces mouvements anormaux pourraient être influencés par une faible force des muscles de la hanche. Et certaines études ont par exemple démontré un lien entre diminution de la force des muscles de la hanche et augmentation du valgus du genou. Mais aucune étude n'a encore observé un lien entre déficit de force des muscles de la hanche et risques de blessures au niveau du LCA... Bien qu'il existe une multitude de facteurs qui pourraient influencer les blessures sans contact au niveau du LCA, la force des muscles de la hanche est un paramètre quantifiable et surtout modifiable. Alors, existe-t-il un lien ?

Figure 1. Commander™ Muscle Tester.

L'étude réalisée

Pour tenter de répondre à cette question, des chercheurs de l'université d'Isfahan en Iran ont voulu étudier le lien entre la force isométrique des muscles abducteurs et rotateurs externes de la hanche en début de saison et les blessures du LCA sans contacts chez des athlètes de différentes disciplines durant une saison sportive. Pour ce protocole, 501 athlètes (138 femmes et 363 hommes) ont participé entre juin 2011 et juillet 2012. Tous ces athlètes ont été recrutés dans des clubs sportifs de différentes disciplines : futsal, football, volley-ball, basketball et handball.

La mesure de force...

Pour mesurer la force isométrique bilatérale des hanches en rotation externe et en abduction. Les chercheurs ont utilisé un dynamomètre manuel (le Commander™ Muscle Tester de JTECH Medical) (Fig. 1). Pour cela, ils ont tout d'abord recruté 17 personnes pour être formées à l'utilisation d'un tel dynamomètre. Après des tests répétés sur plusieurs participants, 10 de ces personnes ont été sélectionnées comme étant celles qui obtenaient la meilleure régularité dans leur prise de mesure. Ce sont finalement ces 10 personnes qui ont réalisé les tests sur les 501 participants à l'étude.

Pour chaque participant, quatre mesures ont été réalisées, deux sur le membre inférieur droit et deux sur le membre inférieur gauche. Pour l'abduction de hanche, les participants étaient allongés sur le côté sur une table de consultation, avec le bassin fixé à la table par un strap. Les participants devaient ensuite réaliser une contraction isométrique maximale en abduction de hanche à un angle d'environ 30° contre le dynamomètre tenu par un expérimentateur et placé sur la cuisse, 10 cm au-dessus de l'épicondyle fémoral latéral. Pour la mesure de force isométrique de la rotation externe de hanche, les participants étaient assis sur le bord de la table, avec la cuisse testée fixée par un strap et le genou fléchi à 90°. Ils réalisaient ensuite une rotation externe de la cuisse contre le dynamomètre placé juste au-dessus de la malléole médiale. Toutes les mesures ont été répétées 3 fois et la moyenne des 3 mesures a été prise en compte et exprimée en pourcentage de la masse corporelle.

Les blessures...

Concernant les blessures, les chercheurs ont interviewé chaque participant à l'étude en fin de saison pour quantifier le nombre de blessures sans contact (le contact du haut du corps avec un adversaire était aussi toléré) survenues pendant la saison au niveau du LCA. Enfin, lorsque c'était le cas, un examen par IRM était effectué pour s'assurer de la blessure au niveau du LCA.

Résultats & Analyses

Sur les 501 participants à cette étude, 25 personnes ont été écartées car le diagnostique de la blessure n'était pas concluant. De plus, 8 personnes (3 femmes et 5 hommes) ont également été écartées car leur blessure était due à un contact.

Le principal résultat de cette étude montre que les athlètes qui ont subis une blessure sans contact au niveau du LCA sont ceux dont la force des muscles des hanches en rotation externe et en abduction est significativement plus faible que celle des non blessés (Table 1). Cette étude met également en évidence d'un point de vue statistique qu'il existe un lien entre la force des muscles des hanches et le risque de blessure sans contact au niveau du LCA. Plus la force de ces muscles sera grande et plus il y aurait un effet protecteur sur le genou, et inversement.

Tableau de données

Grâce aux statistiques, les auteurs de cette étude ont observé que le risque qu'un athlète subisse une blessure sans contact au niveau du LCA passait de 3 à 7% si la force isométrique en abduction de hanche était inférieure 35.4% de la masse corporelle ou si la force isométrique en rotation externe de hanche était inférieure à 20.3% de la masse corporelle. Cependant, le modèle statistique de cette étude ne peut expliquer que 10 à 11% de la variation du statut de blessure. Cela démontre bien que le risque de blessures sans contact est influencé par de nombreux facteurs non modifiables (e.g., être une femme, la structure anatomique, les fonctions neuromusculaires, etc.) et modifiables (e.g., mauvais patterns de mouvement, facteurs environnementaux, force, fatigue, etc.).

Certaines limitations de cette étude sont à prendre en compte. Pour les blessures, les participants étaient les seuls à réellement savoir si leur blessure était survenue sans contact ou avec contact. Les mesures de force ont été réalisées avec un dynamomètre manuel, ce qui implique que les valeurs seuils données sont valables uniquement sur ce type d'évaluation. Du fait que ce type de blessure soit multifactoriel, le modèle statistique basé uniquement sur la force des muscles des hanches peut surestimer ou sous-estimer l'importance de ces muscles dans le risque de blessure.

Applications pratiques

Cette étude met en lumière le lien entre la force des muscles des hanches et le risque de blessure au niveau du ligament croisé antérieur (LCA), et l'intérêt d'un renforcement spécifique dans le cas d'un déficit avéré. Toutefois, comme l'explique très clairement les auteurs de cette étude, leur modèle statistique ne prend en compte que la force isométrique en abduction et en rotation externe de hanche, ce qui explique pour environ 10-11% l'influence sur le risque de blessures sans contact au niveau du LCA. Le renforcement de cette zone est donc important mais ne peut garantir à lui seul une lutte efficace contre les blessures.

Néanmoins, ce type de protocole est facilement reproductible sur le terrain grâce à l'utilisation d'un simple dynamomètre manuel. Il est donc simple de tester et retester régulièrement ces mouvements articulaires pour gérer les niveaux de force et vérifier l'impact de l'entraînement. Pour le renforcement musculaire, l'abduction de hanche et la rotation externe de hanche sont principalement contrôlées par les pelvi-trochantériens (muscles profonds), le grand et le moyen glutéal, et les adducteurs (pour leur action en rotation externe, à l'exception du pectiné et du gracile). Et le renforcement de ces muscles peut se faire très simplement sur le terrain à l'aide de mini-bandes élastiques placées au niveau des chevilles ou au niveau des genoux (voir les mini-bandes élastiques Sci-Sport).

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Références

  1. Khayambashi K, Ghoddosi N, Straub RK and Powers CM. Hip Muscle Strength Predicts Noncontact Anterior Cruciate Ligament Injury in Male and Female Athletes Am J Sports Med 44 (2) : 355-361, 2016.

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