Logo Sciences du sport

Logo Sciences du sport

EN | FR

Informations sur les Sciences de l'Entraînement Sportif

Force, hypertrophie & échec musculaires : Tout dépend de la charge

par P. Debraux | 1 Février 2022

musculation, force, hypertrophie, échec musculaire, muscle, gain, charge, variables, entraînement, science, sport

Pour gagner en masse musculaire, la fourchette classique de 8 à 12 répétitions pour une intensité comprise entre 70 et 85% du 1RM a souvent prévalu. Pourtant, depuis plusieurs années déjà, les preuves scientifiques s'accumulent et confirment que l'hypertrophie musculaire est possible en fonction d'une très large gamme d'intensité de charge allant de 30% à plus 70% du 1RM.

Selon le principe de taille établit par Henneman en 1957, lors d'un effort, les unités motrices sont recrutées de manière ordonnée : les plus petites d'abord et les plus grosses ensuite. En pratique, cela se traduit par le recrutement initial des fibres musculaires de type I, puis au cours de l'effort, avec la fatigue apparaissant, à celui des fibres de type II. Tout cela a pour but de maintenir la production de force. À partir de ce constat, l'idée de s'entraîner à l'échec musculaire est apparue. L'échec musculaire consiste à réaliser une série avec le plus de répétitions possibles (sans s'arrêter pour se reposer). L'échec se définissant comme le moment où aucune répétition supplémentaire ne peut être réalisée. Pour certains, cette manière de s'entraîner est optimale pour l'hypertrophie et la force musculaire puisqu'une telle série suppose que toutes les unités motrices disponibles soient recrutées. Pourtant avec des charges supérieures à 70% du 1RM, un niveau d'activation musculaire élevé peut être atteint sans avoir recours à l'échec musculaire.

Toutefois, les résultats des études sur le sujet divergent car les protocoles oublient souvent de prendre en compte le volume d'entraînement (qui joue un rôle primordial pour les gains en hypertrophie et en force musculaires), ce qui fausse les résultats. Il semble donc important que le volume d'entraînement soit égalisé dans les protocoles d'entraînement afin de comprendre le rôle de l'échec musculaire dans les adaptations musculaires, quelle que soit l'intensité de la charge.

L'étude réalisée

C'est ce qu'a réalisé une équipe de chercheurs brésiliens et américains en comparant les gains obtenus en masse et en force musculaires en fonction d'un entraînement avec charge faible et charge lourde, à l'échec musculaire ou non.

Pour cela, les chercheurs ont recruté 25 participants, non-pratiquants de musculation, qu'ils ont répartis en 2 groupes : un groupe (n=13) s'entraînait avec charge lourde (80% du 1RM) et l'autre groupe (n=12), avec charge légère (30% du 1RM). Pendant 8 semaines, à raison de 2 séances hebdomadaires, les participants pratiquaient le leg extension. Pour connaître l'impact de l'échec musculaire sur la force et l'hypertrophie, tous les pratiquants s'entraînaient de manière unilatérale. Ainsi, un membre inférieur s'entraînait à l'échec et l'autre non. Ainsi, un pratiquant du groupe léger, entraînait une jambe à l'échec musculaire et l'autre jambe de manière classique. Pour l'entraînement à l'échec, les pratiquants réalisaient 3 séries avec un maximum de répétitions. Pour égaliser le volume, pour le membre s'entraînant sans échec, des séries supplémentaires étaient réalisées. Deux minutes de repos séparaient chaque série.

Le 1RM au leg extension a été évalué avec le début du protocole d'entraînement, après 4 semaines pour adapter les charges d'entraînement et après 8 semaines, à la fin du protocole. Pour mesurer l'hypertrophie musculaire, l'aire de section musculaire de la cuisse (à 50% de la longueur du fémur) a été mesurée par IRM, avant et après les 8 semaines de protocole. Enfin, après chaque séance, les participaient reportaient leur niveau d'effort perçu sur une échelle de Borg (CR10), 0 représentant aucun effort et 10, un effort maximal.

Résultats & Analyses

Les principaux résultats de cette étude montrent qu'à charge légère, l'entraînement à l'échec est nécessaire pour obtenir des gains en hypertrophie comparables à ceux obtenus avec une charge élevée. Cependant, l'entraînement à l'échec n'a conféré aucun avantage supplémentaire pour les participants s'entraînant à charge élevée, que ce soit pour la force ou pour l'hypertrophie. Enfin, quelle que soit la charge, l'entraînement à l'échec était le plus intense en termes d'efforts perçus.

Ces résultats montrent que pour obtenir des gains avec des charges relativement légères (30% du 1RM), il est important de s'entraîner à l'échec. Augmenter simplement le volume d'entraînement ne suffira pas pour obtenir des résultats en hypertrophie. L'échec permet d'augmenter le stress métabolique, et selon deux hypothèses de la littérature scientifique sur le sujet, l'accumulation de métabolites stimulerait l'anabolisme ou engendrerait plus de fatigues des fibres musculaires, ce qui permettrait de recruter les plus grosses unités motrices.

En revanche, l'entraînement à l'échec n'a pas apporté de bénéfices supplémentaires lors des entraînements à charge élevée (80% du 1RM), que ce soit en hypertrophie ou en force. Il est probable que les fibres musculaires soient suffisamment stimulées par l'intensité de la charge.

Enfin, toutes les conditions ont permis de gagner en force, et l'entraînement à l'échec n'a pas permis de meilleurs gains. Les résultats montrent que l'entraînement à charge élevée permet clairement de meilleurs résultats : 33.8% et 33.4%, pour les entraînements à charge élevée à l'échec et sans échec, respectivement, contre 17.7% et 15.8%, pour les entraînements à charge faible à l'échec et sans échec, respectivement. Pour la force, un volume seuil d'entraînement serait à privilégier sur l'échec musculaire.

Applications pratiques

L'entraînement à l'échec est particulièrement utile si vous souhaitez ou que vous n'avez pas d'autres choix que de vous entraîner avec des charges relativement légères. Vous pourrez obtenir des gains en hypertrophie similaires à ceux que vous pourriez obtenir avec des charges plus lourdes, tout en gagnant légèrement en force maximale (mais beaucoup moins qu'avec des charges plus lourdes). Si vous vous entraînez avec des charges modérées à élevées, l'entraînement à l'échec ne vous apportera aucun bénéfice supplémentaire à part peut-être une difficulté perçue plus grande, et donc une fatigue plus importante. Dans le cas d'une pratique avancée, quelques séances à l'échec peuvent être une bonne façon de donner un coup de "boost" sans forcément augmenter les charges, mais sur une pratique à long-terme, cela pourrait s'avérer contre-productif.

Pour un public de débutants, le RPE étant systématiquement plus grand lorsque les séries sont réalisées à l'échec, ce type d'entraînement pourrait induire une fatigue inutile entre les séances, altérer la récupération, ce qui pourrait conduire à moins de plaisir durant les séances et donc à une adhérence plus faible à l'entraînement, et in fine, un plus grand risque d'abandon.

Concernant les limitations, cette étude n'a pas pris en compte l'aspect nutritionnel, et aucun des participants n'a été suivi. Toutefois, la nature de l'étude même (les deux cuisses d'une même personne suivant deux principes d'entraînement différents) permet de limiter l'impact négatif de ce phénomène. Même si on pourrait argumenter sur le fait que les personnes s'entraînant avec des charges plus lourdes auront voulu faire plus attention à leur nutrition sans le dire aux chercheurs… Ensuite, les participants à cette étude étaient des hommes, débutants. Qu'en serait-il pour des femmes, des séniors, des adolescents et des pratiquants avancés ? Enfin, seul un exercice mono-articulaire du bas du corps a été utilisé dans ce protocole. Une étude avec un programme représentant la réalité sera donc nécessaire pour confirmer ou infirmer ces résultats.

Références

  1. Lasevicius T, Schoenfeld BJ, Silva-Batista C, Barros TdS, Aihara AY, Brendon H, Longo AR, Tricoli V, Peres BdA and Teixeira EL. Muscle failure promotes greater muscle hypertrophy in low-load but not in high-load resistance training. J Strength Cond Res 36 (2) : 356-351, 2022.

Nous vous rappelons que vous pouvez citer les articles sous réserve de limiter votre citation à 200 mots maximum et d'inclure un lien nominatif vers celui-ci. Tout autre utilisation, en particulier la copie en totalité sur un forum de discussions, sur un site internet ou tout autre contenu, est strictement interdite.

Développez vos Compétences dans les Sciences du Sport et de l'Exercice

Abonnez-vous à notre newsletter et chaque semaine, restez informé de nos nouveaux articles, de nos futurs projets et bénéficiez d'offres exclusives uniquement réservées à nos abonnés.

En cadeau, recevez dès maintenant les ebooks regroupant tous les articles parus en 2019 et en 2018. Puis, au fur et à mesure qu'ils seront réalisés, nous vous enverrons les futurs ebooks, regroupant tous les articles, dossiers et interviews du site au format PDF.

S'abonner à la newsletter

Nous Suivre

Facebook

Instagram

Twitter

RSS

Newsletter

Youtube