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Perte de masse grasse : HIIT ou MICT ?

par P. Debraux | 31 Octobre 2023

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En 2016, le surpoids et l’obésité touchaient 1.9 milliards d’adultes dans le monde. Parmi eux 650 millions souffraient d’obésité, ce chiffre ayant presque triplé en 40 ans. Ces conditions résultent souvent d'un mode de vie sédentaire, d'une mauvaise alimentation (déséquilibrée, de mauvaise qualité et en excès calorique) et d'autres facteurs socio-économiques. Le surpoids et l’obésité ont des répercussions profondes sur la santé. En effet, au-delà de l'aspect esthétique, le surpoids et l'obésité sont étroitement associés à un dépôt de graisse ectopique anormal, la masse grasse viscérale, qui elle-même est un facteur de risque important d’une multitude de maladies chroniques, dont le syndrome métabolique, les maladies cardiovasculaires, le diabète de type 2 et certains types de cancers.

L'obésité est une condition complexe résultant principalement d'un déséquilibre durable entre l'énergie consommée et l'énergie dépensée. L'exercice physique est l’une des pierres angulaires de la prévention et de la gestion de l'obésité. L'intensité de l'exercice est particulièrement cruciale, car elle influence les changements dans l'oxydation des graisses au cours de l'activité. Au cours des vingt dernières années, l’oxydation maximale des graisses et l’intensité d’exercice à laquelle cette oxydation maximale se produit (FatMAX, en pourcentage de VO2MAX) sont devenus des thématiques assez discutées dans la littérature scientifique afin de servir comme outils dans la gestion du poids, la santé métabolique et le choix du type d’entraînement. Certains auteurs ayant d’ailleurs déterminé que FatMAX correspondrait à 43 ± 18% du VO2PIC chez les hommes et à 61 ± 10% du VO2PIC chez les femmes en surpoids ou obèses (le VO2PIC est une variable similaire mais inférieure au VO2MAX, plus adaptée pour l’évaluation aux populations avec des problèmes de santé). Les observations montrent qu'une oxydation maximale des graisses élevée est positivement corrélée au maintien de la perte de poids. De plus, une augmentation de cette oxydation des graisses est bénéfique pour améliorer la sensibilité à l'insuline et diminuer les facteurs de risque métaboliques. De plus, le taux d'oxydation des graisses pendant l'exercice permet de donner une indication de la flexibilité métabolique, c’est-à-dire, la capacité de l’organisme à s'adapter aux changements de la demande métabolique ou énergétique en fonction de l’activité physique réalisée. Or, les personnes en surpoids ou obèses semblent avoir une moins bonne flexibilité métabolique que les personnes de poids normal.

L’oxydation maximale des graisses et FatMAX dépendent également fortement de nombreux facteurs tels que l'âge, le sexe, le pourcentage de masse grasse, le niveau de forme cardiorespiratoire et le type d’exercice réalisé. La littérature scientifique suggère que l’oxydation maximale des graisses peut être aussi bien améliorée par un entraînement continu d'intensité modérée (MICT) que par un entraînement par intervalles de haute intensité (HIIT). L’augmentation de l’oxydation des graisses induite par le MICT résulte d'adaptations de la lipolyse du tissu adipeux, de la lipolyse des triglycérides musculaires et/ou de l'absorption des acides gras par les mitochondries. De son côté, le HIIT améliorait l’oxydation des graisses en augmentant entre autres l'activité enzymatique et le nombre de mitochondries. Cependant, les résultats des études concernant l'efficacité du HIIT et du MICT dans l'amélioration de l’oxydation maximale des graisses sont parfois incomplets et n’offrent qu’une réponse partielle. Ainsi, ces interventions peuvent-elles s'adapter aux adultes en surpoids ou obèses ? Du MICT ou du HIIT, quelle méthode sera la plus bénéfique ?

L'étude réalisée

Pour répondre à ces questions, une équipe internationale de chercheurs a réalisé une méta-analyse afin de comparer les effets du MICT et du HIIT, chez des personnes en surpoids ou obèses, sur l’oxydation maximale des graisses. Pour cela, les chercheurs ont analysé les résultats de 13 études randomisées et contrôlées incluant 519 personnes en surpoids ou obèses (274 femmes et 245 hommes) âgées de 19 à 57 ans. Les participants étaient répartis dans 3 groupes : HIIT (136), MICT (235) et Contrôle (148). Trois articles ont évalué les effets du HIIT par rapport à un groupe contrôle. Six articles ont évalué les effets du MICT par rapport à un groupe contrôle. Et 4 articles ont comparé les effets du HIIT et du MICT sur l’oxydation maximale des graisses.

Les protocoles d’entraînement duraient au moins 2 semaines. Les séances de HIIT étaient réalisées à une intensité d’au moins 75% de VO2PIC. Les séances de MICT étaient réalisées à une intensité modérée équivalent à environ 45-75% de VO2PIC. L’oxydation maximale des graisses a été évaluée au cours de tests d'exercices continus sous-maximaux ou progressifs par calorimétrie indirecte avant et après les interventions.

Résultats & Analyses

Les principaux résultats de cette étude montrent que le HIIT et le MICT sont tous deux efficaces pour améliorer l’oxydation maximale des graisses chez des personnes en surpoids ou obèses. Le HIIT a permis en moyenne un taux d’oxydation des graisses de 0.07 g/min, alors que le MICT a permis en moyenne un taux d’oxydation des graisses de 0.1 g/min. Chez des personnes obèses, quelle que soit la méthode d’entraînement utilisée, les résultats étaient statistiquement similaires.

En réalisant des sous-analyses, les chercheurs se sont aperçus que le MICT, lorsqu’il n’était pas réalisé à FatMAX était plus efficace pour améliorer l’oxydation maximale des graisses (0.13 g/min) chez les personnes en surpoids et obèses que lorsqu’il était réalisé à FatMAX (0.04 g/min). Comme indiqué au début de cet article, pour les populations en surpoids et obèses, l'intensité du FatMAX serait supposée se situer entre 43% et 61% de VO2PIC. Les données de cette méta-analyse montrent que l'intensité optimale pour induire une augmentation de l’oxydation maximale des graisses pendant l'exercice est de 65-70% de VO2PIC.

Les résultats montrent également que le MICT améliore davantage l’oxydation maximale des graisses chez les personnes en surpoids (0.13 ± 0.03 g/min) que chez les personnes obèses (0.04 ± 0.01 g/min). D’autres études ont d’ailleurs observé une corrélation positive entre l’oxydation maximale des graisses et l'IMC, avec un taux d’oxydation plus élevé observé chez les adultes obèses par rapport aux adultes de poids normal et en surpoids, suggérant ainsi que la population en surpoids possèderait un plus grand potentiel d'amélioration du taux d’oxydation des graisses par rapport aux adultes obèses suite à un entraînement.

Enfin, les résultats ont montré qu'il n'y avait pas de différence significative entre le MICT en course à pied (0,09 ± 0,02 g/min) et le MICT réalisé sur vélo (0,10 ± 0,03 g/min). Toutefois, certaines études ont montré que la course à pied était capable de provoquer une plus grande oxydation maximale des graisses par rapport au cyclisme. Cela peut être lié à la quantité et au type de muscle principalement recruté par les différents modes d'exercice. Cependant, pour un public de personnes en surpoids ou obèses ne pratiquant pas une activité physique régulière, il peut être préférable de débuter une activité portante et moins traumatisante comme le cyclisme.

Applications pratiques

Cette étude souligne l'efficacité du HIIT et du MICT pour améliorer l'oxydation maximale des graisses pendant l'exercice chez des personnes en surpoids ou obèses. Le choix entre HIIT et MICT ne devrait pas être uniquement basé sur les effets physiologiques mais devrait tenir compte des préférences individuelles, des avantages tels que l'efficacité en termes de temps, et des inconvénients potentiels tels que les défis d'adhésion à long terme avec le HIIT. Pour des adultes obèses, le HIIT est plus exigeant en termes de perception mais aussi physiologiquement. Certaines études ont observé un manque de plaisir par rapport au MICT, un risque plus élevé de lésions musculaire et articulaire des membres inférieurs, et pour certains protocoles de HIIT très intenses des étourdissements et des nausées. Concernant l'adhésion à long terme, comparant une étude récente a comparé HIIT et MICT, sur une période de suivi de 12 mois. Les personnes initialement assignées au HIIT avaient tendance à s'exercer à des intensités inférieures à celles prescrites, et le HIIT ne présentait pas d'avantage en termes d'adhésion à long terme.

En analysant les résultats des études liées au MICT, les chercheurs ont constaté qu’une augmentation optimale du taux maximal d’oxydation des graisses pouvait être obtenue avec une intensité de 65-70% de VO2PIC, à raison de trois séances de 60 minutes par semaine. Pour le HIIT, le protocole idéal pour des personnes en surpoids ou obèse est moins clair à cause des nombreux formats de HIIT, mais en général, 3 séances hebdomadaires de 15 à 45 min chacune, comportant 3 à 5 répétitions de 20s à 4 min à une intensité allant de 85% de la fréquence cardiaque maximale à des sprints maximaux, avec des repos inter-séries de 60 à 180s.

Et n’oubliez pas, comme nous le rappelions dans un autre article, l’exercice seul, c’est-à-dire sans diète associée et calibrée, qui ne compense pas le déficit calorique créé par l’exercice, ne suffit pas pour une perte de masse grasse efficace. Il n’en reste pas moins que l’exercice cardiovasculaire permettra d’améliorer les fonctions cardiaques, métaboliques et cognitives, il pourra aider à préserver la masse musculaire en période de restriction calorique, et il facilitera la perte de masse grasse si (et seulement si) une diète adaptée en qualité et en quantité est respectée.

Références

  1. Yin M, Chen Z, Nassis GP, Liu H, Li H, Deng J and Li Y. Chronic high-intensity interval training and moderate-intensity continuous training are both effective in increasing maximum fat oxidation during exercise in overweight and obese adults: A meta-analysis. J Exerc Sci Fit 21 (4) : 354-365, 2023.

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