Souvent négligé au profit des quadriceps, les extenseurs de la hanche (ischio-jambiers et grand glutéal) (Fig. 2) sont revenus sur le devant de la scène depuis quelques années. Que ce soit dans le cadre de la prévention des blessures ou pour leur rôle dans la performance sportive dans les disciplines où la vitesse de course est un facteur primordial (sports collectifs, athlétisme, etc.), ces muscles ont le vent en poupe. Et cela ne s'arrête pas là. Depuis que la musculation s'est (re)démocratisée (en grande partie grâce au CrossFit et au renouveau qu'il a apporté dans le milieu du fitness), nombreuses sont les personnes qui cherchent à sculpter leur corps, et notamment leurs fessiers.
Figure 1. Hip Thrust.
Figure 2. Illustration des muscles extenseurs de la hanche.
Dans cette recherche d'hypertrophie musculaire, l'exercice du Hip Thrust (Fig. 1) est devenu au fil des années un incontournable. En effet, plusieurs études basées sur l'électromyographie ont montré que cet exercice permettait un meilleur recrutement des ischio-jambiers et du grand glutéal en comparaison à différentes variantes du squat (Squat arrière, squat avant). Une autre étude, toujours basée sur l'électromyographie a montré qu'en comparaison aux soulevés de terre avec barre droite et barre hexagonale, le Hip Thrust permettait un meilleur recrutement du grand glutéal, mais pas des ischio-jambiers. Le problème est que de grandes valeurs électromyographiques n'impliquent pas nécessairement un fort recrutement d'unités motrices, ni un potentiel hypertrophique important. Or, jusqu'à maintenant aucune étude n'avait pris la peine de mettre en place un protocole qui permettait de mesurer concrètement l'hypertrophie musculaire gagnée grâce au Hip Thrust en comparaison à un exercice comme le squat.
Pour palier à ce manque, une équipe de chercheurs brésiliens a comparé l'impact d'un travail unique avec Squat complet (amplitude complète des genoux) ou Hip Thrust sur l'hypertrophie et la force musculaires. Pour cela, ils ont recruté 24 femmes toutes pratiquantes de musculation (seules 22 ont terminé le protocole). Leur niveau de force de base est indiqué dans la table 1. Pour les besoins du protocole, ces femmes ont été divisées en deux groupes : un groupe Squat et un groupe Hip Thrust. Pendant 12 semaines, les deux groupes ont réalisé une unique séance par semaine. Le protocole d'entraînement était basé sur une périodisation non-linéaire. Chaque séance consistait en 6 séries, chaque série était conduite à l'échec musculaire.
Si les participantes pouvaient réaliser plus de répétitions, la charge était augmentée en conséquence pour correspondre à la fourchette de la semaine.
Avant et après les 12 semaines de protocole expérimental, les chercheurs ont évalué pour toutes les participantes la force maximale musculaire et l'épaisseur musculaire via ultra-sons. Pour la force maximale, les 1RM au Squat et au Hip Thrust ont été évalués (pour TOUTES les participantes). Pour l'hypertrophie musculaire, les chercheurs ont utilisé les ultra-sons pour mesurer l'épaisseur musculaire du grand glutéal et du quadriceps.
Les principaux résultats de cette étude montrent que le groupe Squat a significativement amélioré tous ses 1RM et gagné en hypertrophie musculaire au niveau des quadriceps et du grand glutéal, tandis que le groupe Hip Thrust a uniquement amélioré son 1RM Hip Thrust et gagné en hypertrophie musculaire au niveau du grand glutéal. Mais le groupe Squat a augmenté son 1RM Squat et son hypertrophie musculaire de manière significativement supérieure au groupe Hip Thrust.
Les résultats peuvent être expliqué en partie par l'amplitude du mouvement dans les deux exercices. Car dans ce groupe, le 1RM Hip Thrust n'était pas très différent du 1RM Squat, et donc les charges d'entraînement étaient assez similaires. Dans le groupe Squat, les participantes ont réalisé des squats complets. L'extension de hanche s'est donc réalisée sur une amplitude plus grande en Squat que lors du Hip Thrust (dont l'amplitude est d'environ 40-50°). De plus, l'étirement plus important du grand glutéal a pu jouer un rôle, puisque la tension musculaire était plus importante.
Cette étude vient contredire les précédentes études basées sur l'électromyographie qui donnaient le Hip Thrust gagnant dans la course aux fessiers. Ici, sur 12 semaines, non seulement les pratiquantes de squat complet ont gagné plus en hypertrophie musculaire au niveau des quadriceps et du grand glutéal mais elles ont aussi amélioré de manière équivalente leur 1RM Hip Thrust. Alors que le groupe Hip Thrust n'a pu améliorer que le 1RM Hip Thrust et l'hypertrophie du grand glutéal.
Toutefois, il y a plusieurs points qui méritent discussion. Tout d'abord, il est question dans cette étude de squat complet. Comme vous l'aurez compris à la lecture de notre dossier sur le sujet, nous n'avons absolument rien contre le squat complet, bien au contraire. Cela étant dit, à l'instant t, tout le monde ne peut pas réaliser un squat complet par manque de force, de mobilité, et bien d'autres paramètres. Cela demande donc un certain travail avant de pouvoir réaliser parfaitement ce mouvement au poids de corps, et encore plus avant de charger la barre… Ainsi, le Hip Thrust reste une option tout à fait viable pour un grand nombre de personnes. Il nous parait même logique de l'utiliser comme un exercice complémentaire (c'est d'ailleurs un exercice d'isolation) à un exercice poly-articulaire comme le squat complet. D'autant plus que les angles de travail sont différents. Ne jetez donc pas le Hip Thrust suite à la lecture de cet article !
Deuxième point, il serait intéressant de répéter le même protocole mais cette fois-ci avec des hommes. Ces dernières années, les études scientifiques ont montré des différences au niveau de l'adaptation et des réponses neuromusculaires entre les femmes et les hommes.
Enfin, comme les auteurs le précisent, il est important de faire attention à l'interprétation des résultats liés à l'hypertrophie car la mesure par ultra-sons ne permet de ne donner qu'une indication très locale de l'hypertrophie. Et il existe des différences inter- et intra-musculaires. L'hypertrophie peut ne pas être homogène entre deux insertions d'un muscle.
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