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Cinématique du squat : Que changent les chaussures d'haltérophilie ?

par P. Debraux | 3 Mai 2018

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Parmi les exercices de musculation, le squat est le plus populaire pour le travail des membres inférieurs. Souvent vénéré par certains, il est tout autant détesté par d’autres. Il lui est fréquemment reproché de causer des blessures au niveau des genoux et du bas du dos, à tort. Ce sont généralement les consignes d'exécution données qui peuvent être plus ou moins néfastes et causer plus de mal que de bien (par exemple, la fameuse non-avancée des genoux au-delà de la pointe des pieds, et si vous ne l’avez pas encore lu, nous vous conseillons notre article sur le sujet). Une mauvaise interprétation des données scientifiques et une méconnaissance de l’exercice ont conduit de nombreuses personnes à diaboliser cet exercice, le squat complet en est un très bon exemple (vous pouvez parcourir notre dossier sur ce sujet pour en savoir plus).

Chaussures d'haltérophilie

Figure 1. Chaussures d'haltérophilie (Cliquez pour agrandir)

Le squat est par essence un exercice très difficile puisqu’il implique de déplacer une charge relativement lourde posée sur les épaules, dans une grande amplitude de mouvement. En plus des qualités de force évidentes des membres inférieurs, cet exercice nécessite un gainage fort du tronc et une grande mobilité des membres inférieurs, notamment au niveau des hanches et des chevilles. Et pour maintenir l’équilibre tout au long du mouvement, le pratiquant a la possibilité d’incliner le tronc vers l’avant ou d’augmenter l’avancée des genoux via une dorsiflexion de cheville accrue. Toutefois, l’inclinaison du buste augmentera nécessairement les forces de cisaillement au niveau du bas du dos, et si l’athlète n’est pas assez fort, cela pourrait potentiellement mener à une blessure.

En pratique, les compétiteurs utilisent des chaussures spéciales pour le squat qui ont pour particularité d’avoir une semelle rigide et surélevée au niveau du talon (Fig. 1). Cette chaussure a pour but de fournir une base stable aux pieds, mais permet également d’augmenter la flexion plantaire de la cheville. En revanche, en salle de musculation, de nombreux pratiquants utilisent des chaussures de course à pied pour réaliser leur squat. Ces chaussures sont souvent décriées par les spécialistes car l’amorti de la semelle ne permet pas un support aussi stable (et une bonne restitution des forces au sol) et une sécurité optimale. Quel est l’impact de ces deux types de chaussures sur la cinématique du squat ?

Mesures

Figure 2. Mesures cinématiques (Cliquez pour agrandir)

L'étude réalisée

Pour répondre à cette question, une équipe de chercheurs américains a voulu comparer la cinématique du squat avec des chaussures d’haltérophilie et avec des chaussures de course à pied. Pour cela, ils ont analysé le squat de 25 participants (tous sportifs universitaires et pratiquants de musculation) dans les deux conditions. Le protocole consistait à réaliser une série de 5 répétitions à 60% de 1RM dans chaque condition. Et les répétitions 3 et 4 étaient utilisées pour analyse. Chaque série était filmée de profil et des marqueurs étaient placés au niveau de chaque articulation et de la barre pour l'analyse vidéo. Les chercheurs ont ainsi observé l’angle d’inclinaison du pied, l’angle de flexion de la cuisse, le déplacement de la barre vers l’avant et le déplacement des hanches vers l’arrière (soit le déplacement du tronc) (Fig. 2).

Résultats & Analyses

Les principaux résultats de cette étude montrent que les chaussures d’haltérophilie permettent une réduction significative de l’inclinaison du tronc vers l’avant et une augmentation significative de l’angle d’inclinaison du pied, en comparaison au port de chaussures de course à pied. Aucune différence n’a été observée au niveau de l’angle de flexion de la cuisse (Table 1).

Malgré le talon surélevé de la chaussure de course à pied, la matière qui compose la semelle n'est pas faite pour résister aux compressions, au contraire. Ainsi, lors d'un squat, même avec charge modérée, la semelle aura tendance à s'écraser sous les contraintes et ne permettra donc pas de conserver un angle de flexion plantaire similaire à celui observé avec les chaussures d'haltérophilie. La différence moyenne observée ici était de 3.5 degrés.

Cette surélévation constante du talon entraîne une réduction de l'inclinaison du tronc vers l'avant lors de l'exercice. Pour équilibrer le corps, les athlètes sont naturellement obligés de garder le tronc plus proche de la verticale. De plus, l'avancée des genoux provoquée par l'inclinaison plus prononcée du pied et l'ouverture plus importante de la hanche auront tendance à mettre l'accent sur le travail des muscles extenseurs du genou. Il faut d'ailleurs noter que l'angle d'inclinaison des cuisses n'a pas changé en fonction des conditions. La parallèle étant atteinte à 0°, les pratiquants ont réalisé leur squat avec une même profondeur dans les deux conditions à environ 20°. Cela signifie qu'avec les chaussures d'haltérophilie, les pratiquants ne sont pas descendus plus bas.

Applications pratiques

C’est la première étude qui compare les chaussures d’haltérophilie avec des chaussures de course à pied classique lors d'un squat. En plus de fournir une base stable pour le support du pied, l'inclinaison provoquée par le talon entraîne une réduction de l'inclinaison du tronc. Cela pourrait réduire les forces de cisaillement au niveau du bas dos et augmenterait l'efficience mécanique lors de la phase concentrique. De plus, l'avantage des chaussures d'haltérophilie est de permettre de descendre plus bas au squat grâce à l'inclinaison du pied plus prononcée (et donc d'un besoin moindre de dorsiflexion de la cheville). Cependant, dans cette étude, cela n'a pas été le cas. L'étude ne précise pas si les participants portaient les chaussures d'haltérophilie pour la première fois, ce qui a peut-être influencé les résultats, car de part leur entraînement, les participants ont l'habitude de descendre à une certaine profondeur.

Pour toutes les personnes ne pratiquant pas en compétition et ne souhaitant pas investir dans une paire de chaussures d'haltérophilie, sachez qu'une plus grande mobilité de cheville en dorsiflexion, pieds à plat au sol, permettra également d'avancer un peu plus les genoux, de diminuer l'angle de flexion des genoux et de réduire l'inclinaison du tronc vers l'avant. Certaines méthodes fonctionnent très bien pour améliorer la mobilité de la cheville (eg, mobilisation avec mouvement, auto-massage).

Références

  1. Sato K, Fortenbaugh D and Hydock DS. Kinematic changes using weightlifting shoes on barbell back squat. J Strength Cond Res 26 (1) : 28-33, 2012.

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