Dans l'union européenne, ce sont 49 millions de personnes qui vivent avec une maladie cardiovasculaire. Chaque année environ 1.8 millions de personnes meurent de ces maladies, ce qui représente environ 37% de la mortalité. L'hypertension artérielle serait responsable de près de la moitié de ces morts, et représenterait, dans le monde, plus de 8 millions de morts par an. L'OMS estime que d'ici 2025, 1,56 milliard d’individus seront atteints d'hypertension artérielle. L'augmentation de la pression sanguine est un important facteur de risque pour les maladies cardiovasculaires (infarctus du myocarde, accidents vasculaires cérébraux et maladie coronarienne, notamment). La pression artérielle est quantifiée par deux valeurs, les pressions systolique (pression maximale dans la circulation systémique lorsque le sang est éjecté par le cœur) et diastolique (pression minimale dans la circulation systémique lorsque le cœur se "relâche"). Pour la plupart des adultes, une tension artérielle normale est de 100-130/60-80 mmHg. Mais lorsque ces valeurs dépassent au repos 140/90 mmHg de manière quotidienne, on parle d'hypertension. De nombreux facteurs influencent la pression artérielle systolique et diastolique, notamment le volume sanguin, la compliance des parois artérielles, et les résistances périphériques. Si certains facteurs génétiques et certaines maladies peuvent entraîner une hypertension, la cause principale est souvent comportementale (alimentation, consommation d'alcool, tabagisme, sédentarité, etc.).
Depuis 2017, et les nouvelles recommandations de santé publique mondiale, la limite de l'hypertension est passée de 140 à 130 mmHg, ce qui a logiquement augmenté le nombre de personnes souffrant d'hypertension, et donc potentiellement, le nombre de patients à traiter via la prise de médicaments spécifiques. Outre ces traitements pharmacologiques, l'activité physique (endurance ou renforcement musculaire) est souvent recommandée pour la prévention, le traitement et le contrôle de l'hypertension artérielle. Elle permet d'améliorer différentes fonctions musculaires (lire notre article) et cardiovasculaires (lire notre article) (dont la fonction endothéliale) qui ont pour conséquence de diminuer la tension artérielle. Néanmoins, il existe peu d'études qui comparent directement l'impact des traitements médicamenteux et de l'exercice physique sur l'hypertension. L'exercice physique est-il aussi efficace qu'un médicament ? Existe-t-il un type d'exercice plus efficace qu'un autre pour diminuer la tension artérielle ?
Pour répondre à cette question, une équipe internationale de chercheurs a conduit une méta-analyse (i.e., une analyse regroupant les résultats de plusieurs études sur une thématique précise) comparant les effets d'un traitement pharmacologique à ceux de l'exercice physique sur la diminution de la pression sanguine systolique. Les chercheurs ont analysé au total 391 études contrôlées et randomisés, impliquant 39 742 personnes. Parmi ces études, 194 ont étudié l'impact de médicaments sur la tension artérielle (Inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine (ACE-I), Antagoniste des récepteurs de l'angiotensine II (ARBs), Bêta-bloquants, Bloqueurs des canaux calciques (CCBs), Diurétiques). Ces études regroupaient 29 281 participants. Et 197 ont étudié l'impact de l'exercice physique sur la tension artérielle (endurance, musculation (dynamique et isométrique), et une combinaison endurance-musculation). Ces études regroupaient 10 461 personnes.
Les principaux résultats de cette étude montrent que les médicaments ou le sport permettent de diminuer significativement la tension artérielle par rapport au groupe contrôle. Mais les personnes recevant un traitement médicamenteux atteignent des diminutions de la pression artérielle systolique plus importantes (-8.80 mmHg) que celles qui suivent un entraînement régulier (endurance, musculation ou une combinaison des deux) (-4.84 mmHg). Les différents types de médicaments ainsi que les différents types d'exercice permettent de diminuer significativement la tension artérielle. Mais au niveau des exercices, la combinaison endurance-musculation est celle qui permet la baisse la plus importante (-6.49 mmHg).
Toutefois, en observant de plus près la répartition de l'échantillon total, il apparait premièrement que les études qui ont utilisé l'exercice comme moyen de réduction de la pression artérielle ont recruté beaucoup moins de personnes, environ un tiers de l'échantillon total (10 461 vs. 29 281) ; et que, deuxièmement, la majorité des personnes ayant pris part aux protocoles d'exercices ne souffraient pas d'hypertension. La tension artérielle moyenne au départ était de 132 mmHg pour les protocoles d'exercice, et supérieure à 150 mmHg pour les groupes participants aux protocoles pharmacologiques. Et seul un dixième des personnes souffrant d'une hypertension supérieure ou égale à 140 mmHg provenait des groupes d'exercice.
Lorsque les chercheurs ont étudié l'impact des deux conditions expérimentales en se limitant aux personnes souffrant d'hypertension supérieure ou égale à 140 mmHg, ils se sont rendu compte que l'exercice était aussi efficace que les traitements médicamenteux pour diminuer la tension artérielle (-8.96 mmHg). Pour la combinaison endurance-musculation, la réduction était même de 13.51 mmHg (Intervalle de confiance à 95% de -16.55 à -10.45).
Avec la diminution du seuil de l'hypertension, le nombre de personnes diagnostiquées a logiquement augmenté. Les médicaments prescrits pour cette maladie sont efficaces et permettent de diminuer significativement la tension artérielle chez les malades. Toutefois, l'exercice physique, et notamment la combinaison endurance-musculation, apparait comme une alternative fiable pour améliorer l'état de santé des patients. Néanmoins, trop peu d'études comparant directement le sport et les médicaments chez des personnes souffrant d'hypertension existent à ce jour. Et c'est tout à fait compréhensible puisque la plupart des laboratoires pharmaceutiques qui financent les études ont peu d'intérêts à comparer leurs produits avec des méthodes alternatives sur lesquelles elles n'auront aucun contrôle financier. De plus, la plupart des participants aux études impliquant de l'exercice sont en bonne santé. Et il est généralement plus difficile de diminuer la pression artérielle lorsque celle-ci est relativement normale.
Mais de nombreuses informations manquent encore sur les protocoles d'exercice précis à mettre en place avec les patients pour proposer un remplacement de certains traitements médicamenteux par l'exercice. En plus de connaître, le type, la durée et l'intensité des entraînements, il est impératif de prendre en considération que l'un des défis les plus importants est l'adhérence à un programme d'exercice par le patient afin qu'il en perçoive tous les bénéfices. Et ce dernier point nécessite encore beaucoup de travail. De plus, selon les âges et la condition physique de certains patients, il paraît encore utopiste d'éliminer le recours total à un traitement médical. Comme nous le répétons souvent, le sport est un outil formidable pour la prévention, et la prévention commence dès notre plus jeune âge.
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