Depuis plus d'une vingtaine d'années, l'électromyostimulation (EMS) (i.e., provoquer une contraction musculaire via une impulsion électrique externe) a été largement utilisée dans le domaine de la performance sportive et de la rééducation afin d'améliorer la force musculaire et d'évaluer la capacité de contraction volontaire d'un muscle. L'entraînement avec application isométrique de l'EMS a montré de bon résultats sur l'augmentation de la force musculaire. Cependant, la spécificité de la contraction, la réponse individuelle à ce type d'entraînement, la douleur et l'impact négatif potentiel sur la performance sont autant de limitations à l'utilisation exclusive de cette méthode.
Figure 1. Quel est l'impact de l'électromyostimulation surimposée sur la hauteur de saut vertical ?
Pour ces raisons, l'entraînement avec EMS a été couplé à un entraînement dynamique. Par exemple, combiné à un entraînement pliométrique, des bénéfices sur la force et les performances anaérobies telles que la hauteur de saut ou la vitesse en sprint sont observés. Ces résultats s'expliquent en partie par le mécanisme de recrutement musculaire qui diffèrent de celui d'une contraction volontaire. En effet, dans le cas de l'EMS, les grosses unités motrices sont recrutées à des niveaux d'intensité plus faibles. Reste que le seuil de douleur atteint lors de l'entraînement avec EMS limite les performances.
Pour contourner ce problème, il est possible de s'entraîner en utilisant la contraction volontaire et l'EMS simultanément, ce que les chercheurs nomment l'EMS surimposée. Le principe est simple, une impulsion électrique est envoyée lors d'une phase concentrique et/ou excentrique d'un mouvement. L'exécution d'une contraction volontaire inhiberait l'activation des nocicepteurs (i.e., récepteurs à la douleur) provoquée par l'EMS. Mais quel est l'impact de l'électromyostimulation surimposée sur la force musculaire et les performances anaérobies ? Est-ce que cette méthode permet des gains inférieurs, similaires ou supérieurs à une méthode d'entraînement traditionnelle ?
Pour tenter de répondre à ces questions, une équipe de chercheurs espagnols a comparé 2 modes d'entraînements différents chez 28 étudiants en éducation physique. L'objectif de l'étude était de comparer les effets à court-terme d'un entraînement en force avec ou sans EMS surimposée sur la force musculaire et les performances anaérobies.
Le protocole a duré 6 semaines : 4 semaines d'entraînement à raison de 4 entraînement par semaine suivi 2 semaines de désentraînement. L'entraînement consistait à réaliser 8 séries de 10 répétitions d'extension bilatérale des genoux (i.e., leg extension) à 70% de la contraction maximale volontaire (i.e., force isométrique maximale) avec 3 minutes de récupération entre chaque série. Chaque répétition suivait un tempo précis : 1s pour la phase concentrique, 1s pour la phase excentrique et 1s entre chaque répétition. Les 28 étudiants ont été divisés en 3 groupes :
Pour comparer les effets de ces deux protocoles, les scientifiques ont testé tous les participants de l'étude juste avant le début du protocole, quelques jours après les 4 semaines d'entraînements et juste après la période de désentraînement (i.e., 2 semaines après la fin des 4 semaines d'entraînements). Les tests utilisés étaient les suivants :
Figure 2. Evolution de la force maximale isométrique au cours... (Cliquez sur l'image pour l'agrandir)
Les principaux résultats de cette étude montrent, qu'après 4 semaines d'entraînement, les deux méthodes d'entraînements permettent une amélioration similaire de la force musculaire des extenseurs du genou (+40.2% pour le groupe "EMS + Force" et +31.4% pour le groupe "Force"). Par contre, aucun bénéfice n'est à noter au niveau des sauts verticaux et des temps sur 20m. Et dans le cas, de l'Abalakov Jump, la hauteur de saut était significativement plus faible pour le groupe "EMS + Force" après ce cycle d'entraînement. Enfin, après 2 semaines de désentraînement, les mesures révèlent chez le groupe "EMS + Force", des gains de force supérieurs à ceux observés dans le groupe "Force" (Fig. 2).
Sur une période de 4 semaines, chez des sujets pas forcément habitués à un entraînement de force, les gains en force maximale isométrique sont vraisemblablement dus à des adaptations neurales. Cependant pour observer le plein potentiel de l'entraînement avec EMS surimposée, il semble nécessaire d'accorder une période de repos aux athlètes. Du fait de la sollicition métabolique plus importante de cette méthode (recrutement d'un maximum d'unités motrices) en comparaison à une contraction volontaire normale, le processus de surcompensation nécessite peut-être plus de temps.
Concernant les performances anaérobies testées (i.e., les sauts verticaux et le sprint sur 20m), il semblerait que l'entraînement par EMS surimposée soit néfaste sur la performance en saut vertical mais n'ait aucune influence sur le sprint. Statistiquement, seul l'Abalakov Jump a montré un détériorement significatif de la performance chez le groupe "EMS + Force". Néanmoins, pour les deux autres sauts aussi (i.e., le Squat Jump et le Countermovement Jump), les performances ont diminué de 3.65% au SJ et de 4.90% au CMJ.
Ces résultats peuvent être attribués au manque de spécificité entre le protocole d'entraînement, un exercice d'isolation des extenseurs du genou en chaîne ouverte, et les sauts verticaux et le sprint, mouvements polyarticulaires en chaîne fermée, qui nécessitent une coordination intra- et inter-musculaire importante. Toutefois, des études ont montré que l'électromyostimulation isométrique couplé à un entraînement pliométrique ou de musculation permettait d'améliorer la hauteur de saut. Un complément d'étude est donc nécessaire pour approfondir ce point (voir ci-après).
En résumé, l'entraînement par électromyostimulation surimposée permet une augmentation plus importante de la force maximale isométrique en comparaison à un entraînement de musculation traditionnelle. Cependant, une période de récupération importante suivant la fin d'un cycle doit être respectée pour observer ces gains. De plus, l'avantage de cette méthode par rapport à l'électromyostimulation classique est la diminution de la douleur pendant l'entraînement.
En revanche, pour les performances anaérobies, l'EMS surimposée détériorerait la hauteur maximale en saut vertical. Afin de compléter leur étude et de vérifier ces résultats, la même équipe de chercheurs espagnols a étudié durant 4 semaines (+ 2 semaines de désentraînement) l'effet d'un protocole alliant 2 séances d'EMS surimposée en extension de la cuisse et 2 séances d'entraînement pliométrique. Comme la première étude, la force musculaire était significativement supérieure pour le groupe qui pratiquait l'EMS surimposée et les entraînements pliométriques comparativement à un groupe "Force + Pliométrie". Mais la performance en saut vertical n'était pas améliorée et pour l'Abalakov Jump, elle était détériorée.
Pour conclure, si vous recherchez un gain de force musculaire à court-terme, l'utilisation de l'EMS surimposée peut s'avérer intéressante, tout en pensant à aménager une période de récupération juste après ce cycle. Mais dans des activités sportives où les performances de sauts et de sprints sont primordiales, l'utilisation de l'éléctromyostimulation en isométrique combinée à des entraînements pliométriques pourrait s'avérer être un meilleur choix.
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