Dans de nombreux sports collectifs, et plus particulièrement dans le football, les blessures au niveau des membres inférieurs sont très courantes. Elles peuvent être d'origine ligamentaire ou musculaire, les deux étant souvent fortement liées l'une à l'autre (voir nos articles Ligament croisé antérieur : Prophylaxie et rééducation et Importance du choix des exercices pour la rééducation du genou). Les blessures au niveau de l'aine sont parmi les plus fréquentes en football, de l'ordre de 8 à 18% des blessures totales. Et 69% des blessures à l'aine impliquent les adducteurs de la hanche.
Les adducteurs de la hanche sont au nombre de cinq : Le long adducteur, le court adducteur, le grand adducteur (composé des faisceaux supérieur, moyen et inférieur), le pectiné et le gracile (Fig. 1). Ils s'insèrent tous sur l'os coxal et se terminent sur la face postérieur du fémur. Ils permettent ainsi l'adduction de la hanche (vori le chapitre 1 du cours de biomécanique du sport pour la définition d'Abduction / Adduction) et la rotation externe du fémur.
Des études ont montré qu'un déficit de force des adducteurs était un facteur de risques à la survenue d'une blessure à l'aine. En complément de cela, d'autres études ont montré que le renforcement musculaire des adducteurs de la hanche permettait de traiter efficacement les blessures récurrentes à l'aine. Cependant trop peu d'études ont mentionné l'intensité à laquelle les exercices étaient réalisés. Il semble alors important de connaître à quelle intensité les adducteurs sont sollicités lors d'exercices communs visant à les renforcer. Ces données pourraient permettre de choisir les meilleurs exercices en fonction des capacités d'un sportif en réathlétisation, par exemple.
Pour tenter d'apporter des réponses à ces questions, des chercheurs danois de l'université de Copenhague ont choisi d'examiner l'activité musculaire d'un adducteur de la hanche durant 8 exercices. L'objectif était de savoir quels exercices solliciteraient le mieux les adducteurs de la hanche et de les ordonner en fonction de ce critère.
Pour cela, 40 footballeurs danois de haut-niveau (i.e., Division 1, Division 2 et Under-19 League) ont participé à cette étude. Aucun de ces footballeurs n'avaient de problèmes ou de symptômes au niveau des adducteurs. Pour chaque exercice, l'activité électromyographique (EMG) du muscle long adducteur (Fig. 2) était enregistrée. Chaque athlète a participé à deux séances : la première permettait de se familiariser avec les différents exercices, et la seconde a permis de tester la force de contraction volontaire isométrique maximale afin d'établir un point de repère et enfin de tester chaque exercice. Les exercices dynamiques ont été réalisés avec 3s de contraction concentrique et 3s de contraction excentrique. Pour les exercices isométriques, la contraction maximale était de 6s.
Figure 3. Adduction isométrique avec un ballon entre les chevilles.
Figure 4. Adduction isométrique avec un ballon entre les genoux.
Figure 5. Abduction/Adduction par glissement.
Figure 6. Adduction avec bande élastique.
Figure 7. Adduction couché sur le côté.
Figure 8. Adduction assis à la machine.
Figure 9. Adduction de Copenhagen.
Figure 10. Adduction bilatérale couché.
Les exercices testés étaient les suivants :
Les principaux résultats de cette étude montre que les exercices qui sollicitent le plus le muscle long adducteur sont : l'adduction isométrique avec un ballon entre les genoux (Fig. 4), l'adduction de Copenhague (Fig. 9) et l'adduction avec bande élastique (Fig. 6). Il n'existe pas de différence entre ces 3 exercices. Par contre ces 3 exercices sollicitent significativement plus le muscle long adducteur que les 3 exercices suivants : Adduction isométrique avec un ballon entre les chevilles (Fig. 3), Adduction couché sur le côté (Fig. 7) et Adduction bilatérale couché (Fig. 10). La liste des exercices par ordre d'activation de muscle long adducteur est présentée dans la Table 1. Il n'existe pas de différence significative entre les 5 premiers exercices.
Table 1. Mesures EMG pour le muscle long adducteur en fonction des différents exercices testés. | ||
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Exercice | Jambe dominante | jambe non-dominante |
Les valeurs sont exprimées en pourcentage de la force maximale de contraction isométrique volontaire. | ||
Adduction isométrique avec un ballon entre les genoux | 108 | 102 |
Adduction de Copenhague | 108 | 69 |
Adduction avec bande élastique | 103 | 70 |
Adduction assis à la machine | 99 | 95 |
Abduction/Adduction par glissement | 98 | 89 |
Adduction isométrique avec un ballon entre les chevilles | 86 | 80 |
Adduction couché sur le côté | 64 | 17 |
Adduction bilatérale couché | 14 | 15 |
Les 5 premiers exercices de cette liste sont exécutés dans différentes positions avec différents équipements (e.g., bande élastique, ballon, machine, ou rien) et montrent une sollicitation EMG supérieure à 60%, qui est considéré comme le seuil minimal d'activation musculaire pour obtenir des gains de force. Ainsi les professionnels de terrain pourront inclure en fonction des joueurs, du lieu et du matériel à disposition un ou plusieurs de ces exercices pour renforcer les adducteurs de la hanche et ainsi tenter de prévenir les pubalgies. Cependant, le football étant un sport dynamique nécessitant des efforts brefs et intenses lors des déplacements ou des tirs, le choix d'exercices dynamiques, comprenant une phase excentrique et concentrique pourrait s'avérer meilleur pour prévenir des blessures de l'aine. De plus, les exercices d'adduction à la machine et avec bande élastique permettent de varier les résistances et donc de mieux s'adapter à l'état physique de l'athlète.
L'intérêt principal de cette étude réside dans la quantification de l'intensité d'exercices typiquement utilisés pour renforcer musculairement les adducteurs. Ainsi, il est possible de les classer par ordre d'intensité, ce qui pourrait permettre aux entraîneurs et aux préparateurs physiques d'adapter les exercices en fonction du niveau de leurs athlètes et de leur état de forme et de santé. La plupart de ces exercices ne nécessitent que très peu de matériels et peuvent donc être réalisés n'importe où. Et l'utilisation de bandes élastiques permettra de varier l'intensité de l'exercice même à l'extérieur d'une salle de musculation.
Il est toutefois important de garder à l'esprit que le travail des groupes musculaires doit être réalisé de manière à réduire les déficits de force entre agonistes et antagonistes. Ainsi cette étude fournit des informations intéressantes mais qui devront être complétées à l'avenir pour permettre une meilleure compréhension des origines des blessures et donc une meilleure prise en charge.
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